Une période de transition propice à la surconsommation

L’adolescence se définit souvent par des modifications physiques et biologiques, mais elle ne peut être réduite à cette seule expression. L’adolescence implique aussi des changements sur le plan social : le passage d’un statut d’enfant, nécessitant de la supervision, à un statut d’adulte, responsable de ses propres actes. De plus en plus, les scientifiques s’entendent sur le fait que ce sont les caractéristiques de l’individu et les exigences de son milieu – plutôt que l’âge – qui déterminent les limites de l’adolescence.

Comme les périodes de transition et de bouleversement sont fortement associées à une consommation excessive d’alcool, force est de constater que l’adolescence est en soi un facteur de risque à la surconsommation. Il n’est donc pas surprenant que ce soit à ce moment-là que la vaste majorité des jeunes font leurs premières expériences de consommation d’alcool.

Le développement du cerveau des adolescents

Caractériser l’adolescence de période de changement et de transition est d’autant plus vrai lorsqu’il est question du cerveau. Contrairement à ce que les neurologues et les psychiatres ont longtemps pensé, le cerveau des adolescents – tout comme leur corps, d’ailleurs – est inachevé et en voie de transformation majeure durant cette période particulière de leur vie.

À cet âge, le cerveau subit une reconfiguration et les centres responsables des émotions sont particulièrement modifiés. L’intensité émotionnelle de l’adolescence – dont plusieurs adultes se souviennent parfois avec nostalgie – est un phénomène qui s’explique par le développement neurochimique du cerveau. Par ailleurs, les lobes frontaux* du cerveau sont les éléments dont la maturité est la plus tardive, et c’est là où sont situées les facultés de planification, de stratégie, d’organisation, de concentration et d’attention.

*Le lobe frontal et le cortex préfrontal.

Le lent développement du cerveau peut causer la surconsommation

Si le développement du cerveau des adolescents est lent, la maturation sexuelle des jeunes se produit de plus en plus tôt. Cette étonnante contradiction est identifiée comme l’un des facteurs de risque de la consommation abusive des jeunes.

Ainsi, les adolescents sont doublement à risque d’abuser de l’alcool puisque d’une part, leur habileté à réfléchir adéquatement est en développement et que d’autre part, ils apprécient les sensations fortes. Ils sont donc malhabiles.

Le développement du cerveau des adolescents

Adultes et adolescents ont différentes raisons – de nature individuelle, sociale ou environnementale – qui les poussent à surconsommer de l’alcool.

Boire pour résoudre un problème est un phénomène marginal, mais inquiétant

Une minorité d’adolescents boit de l’alcool pour chasser l’ennui, oublier les soucis quotidiens ou encore surmonter des problèmes familiaux, scolaires ou amoureux.

Lorsque l’alcool est consommé pour de telles raisons, il y a lieu de s’inquiéter. Si l’entourage de l’adolescent remarque un tel comportement à risque, il faut intervenir.

La majorité des adolescents boivent pour socialiser

La vaste majorité des adolescents consomment de l’alcool pour des raisons sociales. Les principales motivations des jeunes à consommer sont d’être ensemble, de s’amuser et de se conformer à la pression du groupe.

Particularité des jeunes, cependant, ils aiment célébrer ou se rencontrer entre amis dans des endroits reconnus pour favoriser la consommation excessive d’alcool.

En ce qui concerne les très jeunes adolescents âgés de 12 ans ou moins, d’autres raisons motivent la prise d’alcool. Les jeunes filles s’initient à la consommation d’alcool parce qu’elles sont tristes et seules ou parce qu’elles veulent se sentir mieux et oublier leurs problèmes. Les jeunes garçons qui prennent de l’alcool le feraient pour faire partie d’un groupe ou parce qu’ils ont des troubles de comportement.

Les problèmes de santé associés à la surconsommation d’alcool

Il existe peu d’études sur la sensibilité biologique des adolescents à l’alcool, étant donné les contraintes éthiques qui entourent l’administration d’alcool à des adolescents à des fins de recherche scientifique. Cependant, plusieurs études animales démontrent que le cerveau adolescent – notamment l’hippocampe qui est une structure cérébrale responsable de la mémoire – est plus sensible aux effets de l’alcool que le cerveau adulte. La très grande plasticité du cerveau des adolescents – et le fait que celui-ci subisse de nombreuses transformations durant la puberté – augmente le risque que les jeunes l’endommagent davantage que ne le feraient les adultes, pour la même quantité d’alcool consommée.

On a aussi constaté qu’une consommation excessive précoce faisait augmenter la prise de décision à risque et que cette conséquence ne s’atténuait pas au fil du temps.

L’équilibre hormonal des adolescents

L’adolescence est associée à des changements hormonaux prononcés et à une augmentation de la production des hormones sexuelles. En retour, ces changements favorisent la production d’hormones de croissance, indispensables au développement humain. Puisque ces transformations sont complexes et se produisent de façon relativement synchronisée, consommer de l’alcool durant cette période particulière risque d’entraver l’équilibre hormonal que requiert le développement des organes, des muscles, des os, ainsi que du système de reproduction.

Ironie du sort, le cerveau adolescent – plus vulnérable aux effets neurotoxiques de l’alcool que celui des adultes – est moins sensible aux effets sédatifs et à la réduction motrice engendrés par la consommation. Par conséquent, les adolescents – dont le cerveau risque davantage d’être endommagé à court et à long termes par la prise excessive d’alcool – sont plus portés que les adultes à en consommer de grandes quantités, puisqu’ils en ressentent moins rapidement les effets immédiats.

La surconsommation et les dysfonctionnements physiques

Plusieurs problèmes de santé causés par l’alcool résultent ainsi d’une surconsommation prolongée. Bien qu’il y ait moins de problèmes de santé causés par l’alcool chez les jeunes que chez les adultes, il n’en demeure pas moins que lorsqu’un adolescent s’intoxique, ne serait-ce qu’une seule fois, il court le risque de souffrir d’un grave dysfonctionnement physique, ce qu’il ignore trop souvent.

Une consommation excessive peut certes provoquer des nausées, des vomissements et des évanouissements, mais elle peut aussi causer des saignements gastro-intestinaux, de l’arythmie cardiaque, un accident cérébrovasculaire (ACV) ou une dépression respiratoire pouvant entraîner un coma éthylique et la mort.

Incidents et accidents

Les jeunes font état de nombreux problèmes sociaux associés à leur consommation parce qu’ils s’intoxiquent souvent et qu’ils prennent beaucoup de risques.

Comportements sexuels à risque

En ce qui a trait aux relations sexuelles des adolescents, un groupe de travail a passé en revue plusieurs études portant sur les effets de la consommation d’alcool chez les jeunes. En résumé, la consommation d’alcool est associée à l’absence de l’utilisation d’un condom lors d’une première relation sexuelle, au risque d’avoir une relation sexuelle à un plus jeune âge, à une relation sexuelle non protégée et à une grossesse non planifiée, ainsi qu’au risque d’attraper une infection transmise sexuellement (MTS).

Si cette association n’implique pas nécessairement une relation de cause à effet, les auteurs notent que la valeur de cette association est assez importante pour conclure que l’alcool contribue probablement à un manque de jugement en matière de comportement sexuel.

Le lien alcool-violence

Les jeunes consommateurs d’alcool sont davantage impliqués dans des altercations violentes, tant comme agresseurs que comme victimes. Comme chez les adultes, l’alcool rend certains jeunes plus enclins à être agressifs.

Par ailleurs, cette association n’est probablement pas strictement due aux propriétés pharmacologiques de l’alcool, mais plutôt à une interaction entre les facteurs biologiques, psychosociaux, situationnels et culturels. Plusieurs recherches démontrent que le lien alcool-violence varie grandement, selon le contexte de consommation et les valeurs qui prévalent dans une société donnée quant au recours à la violence.

Les jeunes qui consomment de l’alcool doivent donc demeurer vigilants, puisque l’alcool facilite probablement l’expression de la violence chez ceux qui y sont prédisposés.

Les effets de la consommation précoce d’alcool